FORUM CB 2017 : Digitalisation des paiements et avenir de la carte bancaire

La transformation numérique que vit actuellement notre société est non seulement liée à des changements technologiques mais également à de nouvelles exigences réglementaires et sociétales.

Cette mutation digitale implique de nouveaux parcours d’achats et de paiement numériques multicanaux de plus en plus nomades dans lesquels le mobile sera le principal fer de lance.

Toutefois, toutes ces évolutions doivent s’inscrire dans un cadre garantissant la sécurité des paiements et celle des données associées. C’est donc tout naturellement que le Forum Cartes Bancaires 2017 a mis l’accent sur les principaux enjeux de cette nouvelle ère digitale : l’innovation avec le LAB by CB, mais aussi des questionnements sur les enjeux du commerce et du paiement de demain ainsi que les parcours clients « nouvelle génération ».

 

Quelques chiffres clés

En 2017, 67 millions de cartes CB sont en circulation en France et génèrent 12 milliards de transactions, dont 1 milliard en sans-contact selon Loÿs Moulin. Les inquiétudes face aux risques de fraude liés au paiement sans contact semblent donc derrière nous. Par ailleurs, les utilisateurs de la carte bancaire ont changé leurs habitudes et sont davantage confiants par rapport à l’utilisation de ce mode de paiement. En ce sens, le paiement sans contact a vu son plafond passer de 20 à 30 euros et selon une étude Mercatel, celui-ci devrait continuer d’augmenter de même que le nombre de transactions sans-contact qui devraient s’élever à 3 milliards en 2018.

 

Les Banques, motrices de la digitalisation du paiement électronique…

Grâce aux smartphones et avec l’émergence des banques en ligne et Fintechs, les services bancaires sont à portée de main des usagers. Selon Marie-Anne Barbat-Layani, « les applications bancaires figurent parmi les trois applications les plus utilisées avec la météo et les réseaux sociaux ».

Néanmoins, les banques ne sont pas les seuls protagonistes dans cette course à la modernisation des moyens de paiements. En effet, pour mettre en place les solutions les plus innovantes et les plus adaptées aux besoins des consommateurs, les acteurs de la chaine de production des services de paiements (banques, PSP, fintechs, fabricants de cartes et puces électroniques…) doivent évoluer avec d’autres acteurs majeurs de l’économie. Les enseignes de la grande distribution, les plateformes e-commerce, les sociétés de transports, les administrations publiques, etc. sont motrices et participent-elles aussi à la création et au déploiement de ces innovations dans les services du quotidien.

Ainsi, les grandes enseignes veillent à mettre en conformité leur parc de terminaux de paiement pour promouvoir le paiement sans-contact et ainsi réduire l’usage des espèces (-5% entre 2016 et 2017). Elles cherchent également à fidéliser de manière plus optimale leur clientèle en intégrant la carte de fidélité à la carte bancaire. Elles proposent par ailleurs des solutions de paiement mobile permettant d’éviter le passage en caisse (Monop’easy à Paris-Madeleine).

Autre exemple, celui des sociétés d’autoroutes. En France, le volume de transactions sur ces dernières s’élève à 1,5 milliard de transactions dont 600 millions sont inférieures à 20 euros. Vinci a donc débuté les tests pour le déploiement du sans-contact sur les autoroutes du sud de la France. Les sociétés autoroutières aspirent également à pouvoir, à terme, utiliser la plaque d’immatriculation pour payer au péage.

Les sociétés de transports, quant à elles, se mobilisent pour faciliter l’achat de billets. Les villes de Bordeaux et Dijon travaillent actuellement sur le projet « Open Payment » pour que l’accès aux transports se fasse via la carte bancaire sans-contact. Et pour finir, l’Ile de France a annoncé la dématérialisation du Pass Navigo sur mobile d’ici 2019.

 

Des concurrents à la carte bancaire ?

Face aux exigences accrues des consommateurs, d’autres initiatives telles que l’Instant Payment semblent être pour le moins prometteuses. Cette technologie, qui a déjà fait ses preuves dans certains pays d’Europe, à l’instar du Royaume-Uni, pourrait s’imposer comme un mode de paiement à part entière. Cependant, la majorité des parties présentes lors de ce forum s’accordent sur le fait que l’Instant Payment ne sera pas un frein au développement de la carte bancaire, tout comme le paiement mobile (Paylib, Apple Pay). Ces différentes technologies de paiement permettront aux consommateurs d’avoir le choix. Elles seront complémentaires et cohabiteront ensemble comme l’ont fait jusqu’à présent la carte bancaire, le chèque et les espèces.

A priori, la digitalisation croissante des moyens de paiements ne devrait avoir aucun impact sur l’usage de la carte bancaire. Selon Pascal Célérier, « la carte bancaire ne s’est jamais aussi bien portée ». Il assure que « la carte physique ou virtuelle est la clé sécurisée du digital », là où l’environnement mobile est plus enclin aux menaces sécuritaires. La certification d’un produit carte a une validité de quatre années au minimum, tandis que sur mobile, elle peut se dégrader en quelques semaines.

Le paiement biométrique, représenté sur le Forum par Gemalto, s’inscrit également comme l’une des innovations les plus attrayantes. La simple empreinte digitale permettrait de payer avec sa carte (contact et sans contact) sans saisir de code. Cette solution sécuriserait et simplifierait davantage les paiements et réduirait le risque de compromission lié à la saisie du code.

 

Carte bancaire et utilité sociale …

L’économie sociale et solidaire est également au cœur des préoccupations de CB. Aussi son objectif serait de pouvoir, à l’avenir, exploiter les données de paiement au profit de la collectivité afin d’optimiser les comportements sociaux et l’aménagement des villes.

Le concours LAB by CB a d’ailleurs été remporté cette année par « Too Good to Go », une application de lutte contre le gaspillage et l’optimisation des invendus. Le concours a également permis de découvrir plusieurs autres nouveautés technologiques futuristes comme les robots (foodBot, coffeeBot) ou encore les écrans connectés.

 

Et la réglementation dans tout cela ?

Ce foisonnement de nouvelles technologies appliquées au monde du paiement met l’accent sur la nécessité de renforcer l’aspect sécuritaire. D’ailleurs, la réglementation européenne sur les moyens de paiements évolue en ce sens avec l’instauration de la DSP2 et des RTS. Ces nouvelles règles ont pour objectif de cadrer les nouveaux enjeux liés à l’ouverture du marché des moyens de paiement, de lutter contre la fraude et de sécuriser les réseaux informatiques et données de paiement.

L’intersection de toutes ces règles additionnées aux contraintes des différents acteurs sur le marché du paiement permettent d’envisager une conformité de l’ensemble du système d’ici 2019.

 

La profusion des nouvelles solutions de paiement fait apparaitre l’une des principales forces de la carte bancaire : son universalité. La carte bancaire restera incontournable, néanmoins cette dernière devra s’adapter aux nouvelles attentes et usages de notre société, tout en tenant compte des enjeux sécuritaires imposés par la réglementation.

 

Saad Benmoussa | Consultant Partelya Consulting

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