Souveraineté européenne dans le domaine du digital : quel rôle pour la fintech ?

Souveraineté européenne dans le domaine du digital : quel rôle pour la fintech ?

A quelques jours d’intervalle (Forum fintech ACPR-AMF organisé dans les locaux de la Banque de France le 11 octobre 2021 et Fintech Révolution organisé par France Fintech le 14 octobre 2021, ndlr.), régulateurs et représentants de la fintech ont eu un discours relativement similaire sur la place des acteurs de la nouvelle économie dans l’évolution de la finance. De potentielles concurrentes, ces entités sont ainsi devenues aux yeux de tous des partenaires potentiels dans la construction de la finance de demain, d’autant plus dans le contexte de la crise sanitaire liée à la Covid-19 qui a accentué cette logique de collaboration. Une réalité d’autant plus renforcée par les réalités géostratégiques caractérisant l’écosystème financier : une galaxie d’approches et d’acteurs au niveau européen, des modèles alternatifs dans les pays émergents et des mastodontes à la logique globale – communément appelés « big tech » – émanant d’Amérique et d’Asie. Cette situation, qui confirme la nécessité, pour l’Europe, de se doter des outils de son indépendance technologique dans le domaine du digital, témoigne du caractère désormais multipolaire de la finance mondiale. Dès lors, quel rôle pour la fintech dans ce contexte ? Selon Alain Clot, président de France Fintech, « la fintech française constitue un atout pour la Place financière de Paris… et joue un rôle primordial au niveau européen ».

Et de fait, rappelons que cette typologie d’acteurs, qui a démontré depuis plusieurs années sa volonté de se développer dans une logique crossborder et non plus uniquement nationale (October, Lemon Way, Particeep, Younited… présents dans différents pays européens, par exemple), bénéficie de l’agilité nécessaire à l’adoption de nouvelles technologies susceptibles d’apporter plus d’innovation au marché. Mais ce n’est pas tout. En créant l’European Digital Finance association, les association fintech des différents pays européens ont manifesté leur volonté d’avoir une voix commune auprès des instances européennes et d’être un acteur à part entière dans la construction de l’Europe digitale. Un positionnement qui arrive à un moment essentiel si l’on se réfère aux déclarations de Bernard Benhamou, secrétaire général de l’Institut de la souveraineté numérique (ISN) : « L’Europe doit définir une vraie stratégie en matière de technologie, notamment sur les objets connectés. Elle doit avoir une vision réaliste en matière de digital. Il est important de définir une véritable stratégie industrielle dans ce domaine ». En somme, l’Europe, si elle souhaite exister à l’échelle internationale, dans l’univers du digital, doit construire les outils de sa souveraineté : réglementation commune, « leaders » européens des nouvelles technologies, solutions homogènes… tant de sujets sur lesquels les fintechs ont un rôle à jouer. Exemple : l’univers du paiement, qui connaît actuellement une étape des plus essentielles avec le projet European Payments Initiative (EPI) visant à doter la région de ses propres solutions en matière de paiement. « EPI est en relation avec certaines fintechs pour travailler sur le sujet des services à valeur ajoutée », indique ainsi Martina Weimert, CEO de l’interim company EPI. « Il existe de réelles opportunités de collaboration », ajoute-t-elle, précisant que le projet vise également à renforcer l’innovation dans les paiements et le digital en Europe, que ce soit dans le domaine de la R&D ou des nouvelles technologies. De quoi confirmer que si l’Europe doit désormais avoir une approche plus pragmatique dans les domaines de l’innovation et du digital, celle-ci se fera difficilement sans les apports concrets et tangibles des acteurs de la fintech

 

Andréa Toucinho

Pôle Études | Partelya Consulting

Par Andréa TOUCINHO, Directrice Études, Prospective et Formations,

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