Big tech, réglementation : la fintech européenne à un tournant stratégique

Le salon Moneylive Spring Europe 2020, organisé du 9 au 11 mars à Madrid, a permis de faire le point sur les différents enjeux inhérents à la finance européenne. Ont notamment été abordés les sujets de l’open banking, la consolidation européenne, l’Internet des objets, la sécurité des paiements, ou encore l’évolution de la fintech en Europe, perçue comme un réel moteur de développement structurel pour l’écosystème financier mondial.

Organisé de façon concomitante avec l’adoption de la sandbox en Espagne, le salon Moneylive Spring Europe s’est voulu l’écho des problématiques propres à la fintech européenne en 2020. Et l’actualité se veut riche : à une réglementation nationale en évolution dans certains pays – exemples : adoption de la sandbox en Italie et en Espagne respectivement en juin 2019 et mars 2020 – s’ajoute une législation européenne des plus foisonnantes – DSP2, RGPD, LAB-LAT… – sans oublier les axes de réflexion prospective que représentent par exemple l’intelligence artificielle et la monnaie digitale, étudiées sous un spectre international. « C’est l’équilibre à trouver entre des réglementations locales et des textes à vocation européenne et internationale qui constitue l’une des grandes complexités de la mise en conformité pour la fintech européenne », témoigne ainsi Ramon Ferraz, CEO de la fintech 2gether, pendant la soirée fintech ayant ouvert l’évènement le 9 mars au soir. Mais ce n’est pas tout.

Approche pragmatique

La fintech européenne se veut également à un tournant en termes de stratégies de partenariats. L’arrivée des big tech dans le jeu impose incontestablement un renouveau stratégique du côté des acteurs du terrain. « Notre approche se veut résolument pragmatique. Notre positionnement : répondre aux besoins des clients », affirme Robin Bresnark, directeur client success de la fintech Buyapowa. Selon l’intéressé, les big techs représentent, au même titre que les entités financières traditionnelles, des acteurs du marché que nul ne peut occulter en termes de concurrence et de partenariats potentiels. Une réflexion qui conduit inévitablement à une autre problématique de plus en plus présente dans l’esprit de la fintech européenne : l’approche systémique inhérente à l’arrivée de ces nouveaux acteurs et les questions géopolitiques que cela suppose. Quelle place accorder à l’Europe face aux propositions de valeur émanant d’autres régions du monde comme l’Asie et les Etats-Unis dans le domaine des services financiers ? Interrogation résolument d’actualité si nous nous référons par exemple au rapprochement récent entre l’acteur asiatique Tencent et deux fintechs françaises à savoir Qonto et Lydia. Autre son de cloche, du côté de l’écosystème espagnol où le volet national semble prévaloir, comme en témoigne l’accord signé fin 2019 entre Santander et Ebury. « Notre approche est résolument nationale mais nous observons également l’Amérique Latine, qui est une région riche en opportunités », illustre ainsi Adrian Martinez, CEO de la fintech espagnole Helloteca, manifestant une fois de plus le positionnement international des pays de Péninsule Ibérique. De quoi renvoyer l’Europe vers une réalité des plus solides : la divergence de l’appréciation du sujet européen en fonction des zones et de l’histoire des divers pays. Gageons que le projet d’alliance européenne de la fintech – dont l’association fintech espagnole Aefi est l’un des membres fondateurs – contribuera à sensibiliser ces écosystèmes nationaux sur les enjeux liés à l’Europe digitale et placera l’angle géostratégique au cœur des réflexions de ces acteurs du terrain.

Par Andréa TOUCINHO, Directrice Études, Prospective et Formations,

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