L’Amérique Latine : une région aux multiples opportunités dans le domaine des services financiers et des moyens de paiement. Tel a été le constat dressé par le pôle de compétitivité Finance Innovation, l’organisation Business France et Latina Fintech qui ont organisé, le 27 octobre 2020, un webinar visant à étudier la situation de la région.
D’abord, un retour aux fondamentaux. Si l’Amérique Latine est riche en possibilités, forte d’une masse considérable en termes de population – dix fois la France – sa valeur vient également de ses multiples contrastes. « Malgré un attrait pour la modernité et une régulation de plus en plus favorable au digital et à la fintech, certains retards subsistent dans le domaine de la technologie et dans l’accès à certains services », affirment les professionnels de la région. Néanmoins, des pépites existent dans une région où les dépôts d’argent s’avèrent parfois plus simples que dans des pays développés, ajoutent-ils en comparant respectivement le Mexique et les Etats-Unis dans ce domaine. « L’Amérique Latine est caractérisée par une croissance très forte en termes de digital. La fintech constitue, dans cette région, la rencontre entre l’innovation technologique et les besoins sociétaux », analysent les professionnels, ajoutant que « la Covid a été un accélérateur de la bancarisation de la population latino-américaine ».
Et de fait, rappelons que face à l’émergence d’acteurs alternatifs comme Nubank, la dépendance vis-à-vis de la banque traditionnelle s’affaiblit. Au Brésil, neuvième puissance mondiale, par exemple, 50 millions de consommateurs ont basculé vers la banque digitale l’année dernière. Nubank recense ainsi 10 millions de clients supplémentaires sur les douze derniers mois. A l’instar des banques locales et des grands acteurs internationaux comme Santander ou encore Citi qui y sont bien implantés, les acteurs alternatifs ont également une carte à jouer dans une région où 50 % de la population est sous-bancarisée. En termes de services, la région compte un certain record en termes de transferts privés – souvent très chers – en raison de l’importance de la diaspora internationale et à l’intérieur de la région. De plus, le boom de l’économie digitale dans une région où la population est majoritairement jeune implique un besoin de solutions en BtoB comme en BtoC. Besoin que les régulateurs ont déjà identifié comme le démontrent les législations adoptées au Mexique ou encore au Brésil favorisant la fintech et accentuant la concurrence. Et pour cause, « au Brésil, les acteurs traditionnels représentent encore 80 % des dépôts », illustrent les professionnels de la région.
Cette volonté d’ouverture se matérialise aussi bien avec la législation qu’avec des innovations en termes de service, comme le lancement de la solution instant payment Pix en novembre 2020. Mais pour remporter le pari de la fintech, l’Amérique Latine devra également affronter un autre challenge : celui de l’internationalisation. Ainsi, si le succès de Nubank au Brésil ne fait aucun doute, son exportation dans d’autres pays de la région, voire à l’extérieur du continent, s’avère moins évidente. A des réalités économiques et sociétales spécifiques – comme la problématique de l’inclusion financière et numérique – s’ajoutent ainsi des réalités sécuritaires indéniables à l’image de la lutte contre le blanchiment de capitaux qui s’avère encore prégnante dans la région. Une situation qui confirme que l’évolution du secteur financier latino-américain ne pourra se faire sans le concours du régulateur, garantissant l’équilibre entre innovation et protection des consommateurs.
Pôle Études | Partelya Consulting
Par Andréa TOUCINHO, Directrice Études, Prospective et Formations,